Sur mon plan de travail, une machine à café. A côté, une boîte ronde en métal blanc à l’effigie d’un moulin à l’ancienne. Et enfin, un paquet de filtres Melitta.
Cheveux ébouriffés, yeux encombrés, je prépare le breuvage matinal. Un rituel. D’un geste mécanique, je soulève le couvercle de la machine et remplis son réservoir d’eau jusqu’au niveau souhaité. Puis je place un filtre sur le support conique et ouvre la boîte en maniant le petit clapet métallique de son couvercle. Hummm ! Des volutes d’arabica s’en échappent, me caressent les narines et me sortent de ma torpeur matinale. Au moyen de la petite épuisette enfouie dans la boîte, je compte quatre doses bien bombées de café moulu et les déverse en pluie sur le filtre. Lentement, délicatement, pour savourer le déploiement optimal des arômes…
Je referme ensuite le couvercle de la machine, appuie sur le bouton de mise en marche : un voyant rouge s’allume. Quelques secondes d’attente. Un bruit saccadé. Martèlements, secousses. Cahot provoqué par les turbulences de l’eau qui monte, bouillonnante, à travers un petit tuyau et coule, goutte à goutte, sur le café moulu, puis dans la cafetière.
J’attends de goûter à la première tasse de cette drogue matinale pour réanimer complètement mes sens. Enfin, le decrescendo des bruits de vapeur d’eau me confirme le dénouement.
Je saisis la cafetière et remplis deux tasses de ce philtre brûlant dont l’arôme se répand maintenant voluptueusement à travers toute la pièce.
Mon tapage a été entendu. Il est là, assis, les yeux mi-clos, la barbe hirsute, l’humeur maussade. Il porte sa tasse à ses lèvres, avale une première gorgée en grommelant :
– T’as la Tribune ?
Julianne Farré